Auguste BEHAL (1859-1941)
3ème titulaire de la Chaire de Chimie organiqueNé le 29 mars 1859 à Lens (Pas-de-Calais)Décédé le 1er février 1941 à Mennecy (Seine-et-Oise)
Né à Lens d’une modeste famille de cultivateurs, Auguste Béhal commença ses études dans une école privée laïque de Lens, puis dans les collèges de Saverne et de Béthune où son oncle Becquet exerça successivement les fonctions de principal. C’est avec ce dernier, retiré à Lens en 1873, qu’il les poursuivit ensuite pendant deux ans.
Il se décida alors à reprendre des études de Pharmacie, bien qu’il ne fût titulaire que du certificat de grammaire qui ne lui permettait de prétendes qu’au diplôme de seconde classe. Il fit ses deux premières années de stage à Lens, à partir de novembre 1875, dans l’officine de Monsieur Wagon. Cet excellent pharmacien et remarquable maître de stage ne se contenta pas de lui donner une solide formation professionnelle, mais il lui communiqua aussi son enthousiasme pour la chimie et contribua à façonner son caractère. Béhal accomplit alors sa troisième année de stage dans diverses officines de Saint-Omer, Lille et Paris, puis, en automne 1878, il commença son année de volontariat à Alençon.
En novembre 1879, il s’inscrivit à l’Ecole Supérieure de Pharmacie de Paris. Dès la première année de ses études, il se présenta au concours d’Internat et fut reçu premier sur 46 candidats nommés. Il choisit comme premier poste l’Hôpital de la Pitié où il fit la connaissance de Léon Guignard, avec qui il ne tarda pas à se lier d’amitié. Il confirma son brillant succès au concours d’entrée, en obtenant la médaille d’argent des hôpitaux en 1882 et 1884, puis la médaille d’or en 1885.
Ses années d’internat vont lui permettre de déployer une fructueuse activité. Déçu par l’enseignement de la chimie organique donné par Jungfleisch en notation équivalentaire, il suit en Sorbonne les cours d’Adolphe Wurtz, adepte de la notation atomique. C’est en écoutant ce maître que sa vocation de chimiste, éveillée par le pharmacien Wagon, va s’affirmer et aussi qu’il sera convaincu de la nécessité de substituer les formules atomiques aux formules en équivalents dans l’enseignement de la chimie organique.
A partir de 1882, il est chargé d’un cours de chimie élémentaire à l’Union Française de la Jeunesse et, en 1883, il entre dans le laboratoire de Friedel où il s’initie à la recherche et effectue ses premiers travaux. N’en négligeant pas pour autant les études théoriques, il est bachelier en 1883 et licencié ès sciences en 1884.
L’année 1886 le récompense de ses efforts : il publie les résultats de ses premiers travaux sur l’hydratation de l’oenanthylidène, il est reçu au concours de pharmaciens des hôpitaux et, enfin, acquiert, le 4 décembre, le diplôme de pharmacien de première classe, alors qu’il a terminé sa scolarité depuis plus de quatre ans.
Deux ans plus tard, en avril 1888, il soutient sa thèse de doctorat ès sciences et, l’année suivante, il est brillamment reçu au concours d’agrégation. Toutefois, première des déceptions qu’il devait éprouver dans sa carrière, il n’est nommé que pour cinq ans, alors que les autres agrégés sont institués pour dix ans, selon les dispositions du statut en vigueur depuis 1874. Il effectuera donc son temps d’agrégé de chimie à partir du 1er novembre 1889. Dès son entrée en fonction, il introduit une demande en vue d’être autorisé à faire un cours libre de chimie organique, pour y exposer sa théorie atomique.
Après de multiples péripéties, dont on pourra prendre connaissance dans les biographies dues aux Professeurs Delépine et Anot, ce cours fut autorisé par l’Assemblée de l’Ecole le 3 juillet 1890 et eut lieu de 1890-1891 jusqu’en 1897-1898, bien que les fonctions d’agrégé de Béhal aient normalement pris fin le 31 octobre 1894. Ce cours fut suivi avec enthousiasme par les étudiants, mais l’attitude adoptée par Béhal dans la douloureuse affaire Dreyfus provoqua des manifestations hostiles de la part des étudiants, ce qui conduisit l’Assemblée de l’Ecole à ne pas renouveler son autorisation en 1898. Cependant, sur la proposition de Friedel, Béhal était nommé maître de conférences de chimie organique à la Sorbonne en mars 1898. Il ne devait le rester que jusqu’en 1901, après avoir éprouvé la déception de se voir préférer Haller en 1899, comme titulaire de la chaire à la mort de son maître Friedel.
Le 31 mars 1901, il est nommé professeur de Toxicologie à l’Ecole Supérieure de Pharmacie de Paris, présenté en première ligne par la Section permanente du Conseil Supérieur de l’Instruction Publique, contrairement à l’avis du Conseil de l’Ecole qui lui avait préféré Ouvrard. Cependant, Jungfleisch ayant été nommé au Collège de France, il lui succède dans la chaire de chimie organique le 1er février 1908, nommé par décret du 31 janvier. Il conserve cette chaire jusqu’à la retraite, à 75 ans, le 31 juillet 1934, et fut alors nommé professeur honoraire par décret du 11 août.
Nommé pharmacien des hôpitaux à 27 ans, Béhal exerça ces fonctions jusqu’à 65 ans, âge de la retraite des hospitaliers. Il fut successivement pharmacien chef des hôpitaux de Bichat, pendant deux ans, du Midi, pendant 13 ans, puis quelques mois à Trousseau et à Boucicaut, avant d’être nommé le 1er juin 1904 à la Maternité.
RECHERCHES
Après ses premières recherches sur les carbures acétyléniques, Béhal s’est intéressé à bien des secteurs de la chimie organique, ce qui l’a conduit, selon l’expression du professeur Gautier « à enrichir le Beilstein de nombre d’espèces nouvelles », qu’il n’est pas possible de citer toutes ici. Rappelons cependant quelques uns de ses travaux les plus marquants. Avec Choay, il effectue toute une série de recherches d’intérêt pharmaceutique sur les phénols : analyse des créosotes, synthèse du gaïacol et son obtention à l’état cristallisé, découverte ou préparation de nombreux autres dérivés des phénols. Avec Auger, il étudie les acides maloniques, décrit de nouveaux modes d’obtention des chlorures d’acides, de l’acide monochloracétique et du chlorure d’acétyle. Il prépare également de nombreux dérivés mono ou dicétoniques et décrit une méthode de synthèse du camphre à partir de l’essence de térébenthine. Il étudie ensuite les anhydrides mixtes des acides cycliques et acycliques, entreprend une étude fructueuse de la déshalogénation des dérivés chlorés du toluène et de ses homologues, puis l’étude de la chlorurée, intéressant agent de fixation de l’acide hypochloreux sur les dérivés éthyléniques, et de l’acide cyanurique, réactif avantageux pour la préparation des allophanates.
DISTINCTIONS HONORIFIQUES
Membre de la Société chimique dès 1886, il en devint le secrétaire en 1893 (Secrétaire général à partir de 1905), vice-président à partir de 1908, président en 1911, président d’honneur en 1931.
Membre de la Société de Chimie industrielle dont il obtint en 1933 la grande médaille d’or et dont il devint président d’honneur en 1937.
Membre résident de la Société de Pharmacie de Paris (future Académie) qu’il présida en 1905.
Il fut élu à l’Académie de Médecine en 1907, après que cette compagnie lui eût préféré Yvon en 1899. Il en fut le vice-président en 1921 et le président en 1922.
Il fut élu à l’Académie des Sciences le 31 janvier 1921, après avoir subi un échec en 1911, qui fut pour lui une déception d’autant plus cruelle que la compagnie lui préféra un de ses disciples. Il en fut le président en 1939 et en reçut le prix Jecker en partie en 1881 et en totalité en 1900.
Pendant la guerre de 1914, il contribua à la création d’un Office de produits pharmaceutiques et chimiques dont il fut nommé directeur par décret du 17 octobre 1914 et qui accomplit une tâche considérable dans la mise en route de diverses fabrications indispensables à la défense nationale.
Commandeur de la Légion d’Honneur le 1er février 1919 en récompense de ses services, il fut élevé à la dignité de Grand Officier en juillet 1929. Il était titulaire de nombreux ordres étrangers.
BIBLIOGRAPHIE
Auguste Béhal publia en 1896 l’essentiel de son enseignement dans son « Traité de chimie organique d’après les théories modernes », ouvrage qui fut célèbre pour des générations d’étudiants en chimie et dont une troisième édition, en collaboration avec Valeur, paraîtra en deux volumes en 1908 et 1911.
Source : Société d’Histoire de la Pharmacie